Les Girouettes à bicyclette
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Criques, masques et eaux turquoises

6/29/2020

8 Commentaires

 
Photo
Plage de rêve pour dormir
Retour sur nos montures, retour à la vie nomade. Le printemps est bien avancé, les fleurs sont là (l’allergie au pollen aussi) et on est heureux de se remettre le nez au vent pour une semaine. Une semaine seulement car en raison de la crise du Covid-19, il y a encore des confinements les WE et les deux prochains sont des ponts. Eh oui, "masque" dans le titre de l'article ne veut pas dire "masque de plongée"...
Nous partons donc en direction de Çesme pour rejoindre Marion et Simon. Nous avons rencontré Marion à la ferme, elle connaissait Veysi et Türkan et est venue quelques jours pour leur filer un coup de main. Ils ont entrepris un voyage vers la Mongolie dans une vieille 4L. Bloqués eux aussi par les fermetures de frontières, ils se sont arrêtés en Turquie où Simon a une maison. Maintenant ils prévoient de revenir en France pour aménager leur terrain dans les Pyrénées qu’ils ont acheté en commun avec un ami. Leur projet est d’y vivre dans des yourtes/cabanes/caravanes avec les gens qui souhaitent les rejoindre. Bref, on ne pouvait que bien s’entendre avec eux! Au programme : petits déjeuners à rallonge, couture (Marion est couturière et on en profite pour apprendre à rénover nos chemises et se faire des masques sur mesure!), yoga, pêche et baignade quand on peut sortir. Des vrais vacances quoi! On se sent ici comme à la maison, avec des amis ouverts et bienveillants. Peu de pauses comme cela nous permettent de se reposer autant.

La petite semaine de vélo qui nous sépare de Çesme nous permet aussi de “tâter” l’ambiance. Après avoir vécu “reclus” plus d’un mois dans nos montagnes, on ne sait pas trop à quoi s’attendre. Est-ce qu’une bombe est tombée sur la Turquie et a bouleversé les comportements? Oui et non.
Oui car on sent que la distance est maintenant la norme. Il y a beaucoup moins de monde dans les rues, seuls les magasins essentiels sont ouverts. On sent le regard parfois accusateur : clairement nous ne vivons pas là et nous sommes nomades. “Depuis quand et comment sommes nous rentrés en Turquie” est maintenant la 2e question que l’on nous pose après “D'où venons nous”.
Et non car on sent encore la curiosité et le contact possible pour beaucoup de personnes. En demandant de l’eau, on se fait offrir le “Corona-çay” : soucieuse de nous donner un peu plus que de l’eau, une dame nous fournit table et chaise pliante, thé et baklavas, pour être installés comme dans son salon… mais dans la rue! Pendant qu’elle se met à son balcon pour pouvoir papoter. Nous avons aussi profité du confinement pour apprendre un peu de Turc, langue réputée parmis les plus difficiles. On sait maintenant conjuguer les verbes, poser une question, demander la permission, construire des phrases simples… et on sent vraiment la différence! D’abord les gens apprécient, et nos contacts sont d’autants plus riches, sans en aller jusqu’à la discussion politique ou philosophique.
Corona-çay
Marchés vides et masques
Sociabilité dans des bains chauds en bord de mer
Marion, Simon et leur voisin Karl
On se dit alors que l’on peut continuer. Le monde ne sera plus comme avant et pour un moment. Il va moins nous plaire, c’est sûr. Mais quoi! nous sommes en voyage pour voir le monde tel qu’il est, pas tel que nous le rêvons. Tant que c’est matériellement possible d’avancer, nous voulons continuer. Et à ce moment là, les conditions matérielles (= les provinces ouvertes à la circulation) nous aiguillent vers la côte sud ouest de la Turquie. Nous projetons de la suivre jusqu’à Antalya. Bien que cet itinéraire nous ait été recommandé par beaucoup de Turcs, nous n’y étions pas favorables : trop de tourisme, qui aura immanquablement détruit la côte et l’ambiance. Mais sans touristes, c’est différent, oui, nous sommes un peu misanthropes de ce point de vue là. 

On s’élance sur cette côte si réputée pour ses plages, ses beaux points de vue et ses sites historiques. C’est le printemps et les fleurs donnent tout ce qu’elle peuvent pour attirer l’abeille et le bourdon. La concurrence est rude pour notre plus grand bonheur. La nature est généreuse ici et donne aux humains qui veulent bien l’apprivoiser des fruits à n’en plus finir. Ce ne sont pas les paysages les plus fantastiques, car les vergers aussi s’étendent à n’en plus finir. Mais à mesure que nous descendons vers Bodrum, les plaines fertiles laissent place aux montagnes de plus en plus abruptes. Les sites historiques, eux, restent muets. Mesures contre le coronavirus, les musées sont fermés. Nous passons avec regret devant la mythique citée d'Ephèse et ses 2000 ans d’histoire. 
La tente prend enfin du service. Distanciation sociale oblige, demander l’hospitalité n’est plus adapté. Mais il faut dire que le camping est agréable vu la température, et quand on trouve un spot en bord de mer pour faire un plouf le soir et le matin, c’est le bonheur…. Sauf quand on tombe sur les flics. Les effectifs de police sont abondants en Turquie (le service militaire est en vigueur et beaucoup de jeunes gens rejoignent les rang de la police et des jandarma) et on croise au minimum un contrôle routier par jour. Sur la route, ca se passe toujours bien. A notre grand étonnement nous ne sommes jamais arrêté, voire on leur décroche un grand sourire. Mais nous apprendrons à nos dépends que camper sur la plage n’est pas une bonne idée. On se fait reveiller un soir à minuit : “Jandarma, ici c’est interdit, Coronavirus, vous connaissez?” - “bah oui on connait, et franchement c’est pas en nous virant d’une plage déserte à minuit qu’on va lutter contre le virus!”. Finalement un coup de fil (au supérieur probablement) nous sauve et on sera quitte pour cette nuit là. Mais on est prévenu : contrairement à ce que nous disent tous les Turcs, camper sur la plage c’est pas une bonne idée.
Prudents, on demande maintenant aux locaux où dormir. C'est comme ça qu'on tombe sur Ibrahim, pêcheur  sur son petit bateau, qui nous montre son squat pour poser la tente.
Alors on se met à douter. Nous rêvions d’un voyage “j’irais dormir chez vous” mais à l’évidence, ce ne sera pas possible. Combien de temps la méfiance, les restrictions vont elles durer? Il faudra réussir à passer outre ces désagréments, apprécier chaque rencontre le jour et trouver d’autres moyens de lier des contacts, Woofings par exemple? 
Et comme par magie, “la route” nous envoie des signes aux alentours de Dalaman. 
D'abord Serdar et Yasin, deux cyclistes Turcs à l'anglais parfait que nous rencontrons sur la route. On papote, et très vite on s'installe dans un parc pour pique-niquer ensembles. Nos deux compères sont pilotes de chasse, en astreinte dans la région en raison de la proximité avec les îles grecques (génératrices de tension sur les frontières). C'est assez intéressant de discuter sur ce sujet avec eux. Même si la conversation reste sur un niveau "politiquement correct", leur prise de recul sur la situation nous permet de mieux saisir les enjeux géopolitiques du lieu. Ils nous font aussi bien marrer avec leur set "café de camping" avec moulin très haute qualité, balance connectée au smartphone pour mesurer la quantité d'eau et de café, et les grains sous vide importés d'Allemagne. Comptez au bas mot 300€ pour l'ensemble (ca a l'air de bien payer pilote) et deux bons kilos en plus sur le vélo alors que pour tout le reste ils sont en mode ultra-light! On tentera bien de se faire inviter le soir, mais ils logent sur la base aérienne, là, c'est vraiment tendu.
Alors on repart, un peu tard, en n’ayant rien repéré de terrible sur la carte pour dormir. Mais c'était sans compter sur Suzanna. Cela part d’une photo volé depuis son magasin. On la repère, on lui fait des grands coucou pour se marrer et nous voilà invités à boire le café. Elle ne parle pas un mot d’anglais, mais notre turc fera l’affaire. Elle fait aussi du vélo, du camping, ce qui apparement est rare en Turquie (on apprendra que les relations hommes-femmes sont assez dichotomiques, avec des filles "princesses" et des garçons "gros durs"). Assez vite, et assez naturellement, elle nous invite à dormir chez elle et à venir manger dans le resto de ses amis! Ces deux rencontres nous ont donné l’espoir que le voyage continue un peu comme nous l’envisagions au départ.
Et enfin, il y a Seb, cyclo Français rencontré par un heureux hasard le lendemain. Alors qu’on fait une pause, on entend derrière nous “Salut les Francais!”. Seb est parti il y a 1 an de France, pour une durée indéterminée. Ancien coursier à vélo sur Lyon, c’est un mordu de km, et il fait aisément deux de nos journées en une. Au moment de notre rencontre, il est posé à Göcek depuis 2 mois, dans l’appartement d’un ami turc rencontré seulement 3 mois plus tôt. Lui aussi doute. Alors on se pose une journée chez lui et on doute ensembles. Sauf qu’à plusieurs, on se donne des idées et de l’énergie. Lui pense rester 1 an ici et reprendre le voyage l’année prochaine, on y avait pas pensé. Nous on le motive à repartir et tenter de passer en asie centrale, c’est encore possible! On passe une partie de la soirée avec le propriétaire de son appartement, un vieux monsieur de 70 ans qui se sent un peu seul. Notre Turc nous permet d’échanger avec lui, de savoir qu’il est fier de ses 4 enfants qui ont tous du travail et une famille plus ou moins loin, jusqu’en Allemagne pour l’un d’eux. Cette pause avec Seb aura été un bon moment avec un vrai ami, qui permet de se redonner du courage.
Suzanna
Serdan et Yasine
Seb, son ami Yildirim et le propriétaire
Sur les conseils de Seb, nous quittons la route principale après Fethiye pour se perdre dans le massif au sud de la montagne Babadağ. Grand bien nous en a pris. Cela nous coûtera quelques milliers de mètres de dénivelés en plus mais nous y admirerons les paysages les plus grandioses de notre voyage. On passera aussi par plusieurs villages paisibles, où la vie semble s’écouler de la même manière depuis des centaines d’années. Ils ne sont pas si loin des grandes villes (3h de voiture peut-être), mais cela suffit pour leur donner la sérénité d’une communauté qui vit sobrement et selon des techniques ancestrales. 
Retour à la civilisation après 3 jours d’autonomie. Une grosse crevaison nous vaut une belle rencontre avec Salih, Fatima et leur famille. Le soleil est à son zenith, il fait chaud en ce début juin, et changer la chambre à air nous vaut une belle suée. Salih nous invite à se poser chez lui avec un çay et un beau plateau de fromage, olives, tomates… super! On découvre sa maison toute simple, les quelques serres qu’il exploite, on papote et on fait connaissance avec les voisins, comme à la maison quoi. En repartant, il nous conseille la plage de Patara pour dormir, fabuleuse et déserte selon lui. “Tu es sûr hein? les plages en Turquie ça nous réussit pas pour l’instant”. Devinez? Patarra héberge aussi un site historique alors la province a fermé le lieu et fait payer à la journée, avec interdiction de rester le soir. Et globalement, nous seront souvent confrontés à des plages privatisées ou payantes sur la côte. On est chanceux en France d’avoir un conservatoire du littoral aussi puissant et déterminé à garder l’accès à tous, pourvu que ça dure!

En attendant, la côte est toujours aussi belle, avec ses montagnes qui plongent dans la mer, ses petites plages (on arrive à en trouver des publiques), et ses villages. Nous sommes début juin, la situation se détend un peu et les musées réouvrent. On fait donc enfin connaissance avec la civilisation Lycienne en visitant la citée de Phaselis. Cette civilisation a peuplé toute la côte que nous suivons depuis notre rencontre avec Seb. Comme les Etrusques en Italie, elle a vécu jusqu’en 300 av JC environ, était très développée et vivait en ligues de citées, mais à laissé très peu de traces et une langue toujours mystérieuse. Elle fait la fierté de ses habitants actuels, et une discussion avec un des gardes de la citée nous confirme le sentiment que nous avions en visitant cette partie de la Turquie : “Nous les Turcs nous nous sommes battus avec les Grecs, mais ici sur la côte, nous sommes plus proches des Grecs que des Turcs d’Anatolie. Notre mode de vie, notre nourriture est clairement Égéen".
Salih et Fatima
Serres à perte de vue autour de Demre
Phaselis. Les Turcs utilisent aussi les sites antiques comme parc-plage à la journée, ça les rend plus vivants!
Les chiens sont les grands amis de l'homme en Turquie
On arrive bientôt à Antalya, qui marque la fin de notre parcours sur la côte sud-ouest turque. Nous sommes superbement accueillis par Erol, contacté via Warmshowers. Il nous fait découvrir sa ville qu’il aime tant. Les grands parcs en bord de mer, la vieille ville, ses bonnes adresses. Erol est médecin généraliste et nous passeront beaucoup de temps à discuter du système de santé turc et du traitement de la crise du coronavirus. Nous ferons un article dédié. Il nous invite aussi à une “soirée conversation en anglais”, en réalité un rassemblement d’étrangers installés à Antalya pour différentes raisons. Mais tous ont une histoire originale qui vaut le coup d’être découverte. Il y a un libanais, ancien militaire dans les renseignements qui a pris sa retraite et gère sa petite entreprise de services sur internet. Un Indien, qui a gravi les échelons de son entreprise à la vitesse de l’éclair mais qui a tout laissé tomber, voyant qu’il ne profitait plus de rien. Il redécouvre maintenant la valeur du temps et de l’argent, et veut ouvrir un Ashram pas loin d’Antalya. Un russe d’Ossetie qui vivait en Inde mais qui a fuit à cause du coronavirus et qui ne veut pas retourner en Russie car il ne s’y sent pas libre. Et bien d’autres avec qui nous n’avons pas eu le temps d’échanger.
Erol, toujours le sourire!
Groupe de conversation
Tout le monde profite de la plage en ville
Nous n’étions pas du tout pour faire cette côte avant le coronavirus, mais vidée de touristes, c’est différent, et puis de toutes façons nous n’avions pas le choix. Nous avons eu des paysages fabuleux, des plages, une nature rien que pour nous et ça c’était vraiment le pied. Après avoir gouté à l’hyper-moderne Istanbul, c’était partir à la découverte de la portion Égéenne de la culture Turque, “détendue” et tournée vers l’Europe. 
Maintenant nous avons envie de voir une autre facette de la Turquie : celle du plateau Anatolien. Réputée plus traditionnelle, elle puise plutôt sa culture chez les Seljuk et l'âge d’or de la route de la soie. Pour ça il nous faut prendre un bus (c’est grand la Turquie), direction Erzingan.
Photo
Parce que en vélo, ce serait trop lent!
8 Commentaires
Michel Maccagnan
6/30/2020 01:52:07 pm

Merci pour cet excellent article avec de belles photos. Pas de bol pour les sites archéologiques fermés. On vous suit.
MM

Réponse
Cécile
7/2/2020 11:38:25 am

Aurore tu as bien musclé le cuissot dis donc !! ;) ;)

Réponse
Aurore
7/2/2020 01:26:33 pm

Et c'est pas fini!

Réponse
Kolette
7/5/2020 10:25:32 am

Salut les girouettes â bicyclette
C'est super l'aventure que vous vivez dommage qu'elle doive se raccourcir
Continuez bien Grosses bises

Réponse
Aurore et Clément
7/16/2020 09:15:04 pm

Merci Kolette! Oui, nous n'irons pas aussi loin que prévu mais pas le choix. On est contents d'être toujours en voyage déjà et de vivre ce moment particulier sur nos vélos.

Réponse
Hélène
7/11/2020 09:56:49 pm

Coucou Aurore et Clément, C'est vraiment super votre voyage. Vous vivez des rencontres riches de ressentis . Merci à tous deux de nous faire partager vos aventures. Continuez sur la route de l'incertitude, elle vous mènera où vous avez envie d'aller. Bises hourtinaises

Réponse
Aurore et Clément
7/16/2020 09:16:44 pm

Merci Hélène! Oui, disons que l'on voyage au gré des ouvertures et fermetures de frontières ^^

Réponse
Mauricette guilhot
9/18/2020 08:34:05 am

C'est génial. Je rêve de faire ce que vous faites... Mais j'ai une peur, laquelle je sais pas..
Bravo, le texte et photos sont magnifiques. Ça fait envie...

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